Linky, l'Etat complice : Pourquoi ?

Avec le déploiement Linky, on constate encore une fois que l’Etat fait porter de manière récurrente par l’ensemble des contribuables ses fautes, les carences d’un système et ses erreurs de gestion...
Même le site officiel de l'administration française affiche des informations qui sont en contradiction avec les différents textes de loi qui permettent de s'opposer au compteur Linky !
Comme nous l'avons déjà exposé il n'existe pas "d'obligation légale" d'accepter la pose d'un Linky.
Nous avons tous en mémoire (et notre porte-monnaie aussi) le montage et la gestion calamiteuse du projet des « fameux » portiques destinés à taxer les transporteurs routiers : Ce projet n’ayant pu être mené à terme, ce sont tous les automobilistes qui aujourd’hui supportent cette taxe sur leur carburant !
Le projet Linky, sorti des cartons dans le cadre de la loi sur la transition énergétique (et on peut dire que cette loi fut une réelle aubaine pour ses instigateurs...), présente des caractéristiques dignes de la gestion « à la française » : Reporter sur l'ensemble des contribuables/usagers les charges et les déficits induits par une gestion par les pouvoirs publics que l'on pourrait qualifier d'amateurisme. 

Posons les problèmes : 

EDF est largement déficitaire et perd des clients avec l’ouverture du marché de l’énergie à la concurrence…
Le groupe Areva a accumulé 10 milliards d'euros de déficit au cours des cinq dernières années…
Augmenter le prix de l’électricité, mesure impopulaire d'une part et contre productive d'autre part dans un contexte devenu fortement concurrentiel ne peut être retenu comme solution pour renflouer les caisses.  Il faut donc trouver une société, au sein du groupe EDF, qui soit indépendante vis à vis du nucléaire afin de ne pas froisser les sensibilités écologiques, et dont la situation de quasi monopole lui permet de développer des activités et des services sur un marché ainsi protégé...
L'élue est toute trouvée : Enedis ! 

La solution en trois points : 

  • Enedis (ex ERDF créée en 2008), filiale à 100% d’EDF est en situation de quasi monopole et son rôle de gestionnaire de réseau la rend incontournable quelle que soit l’origine de l’électricité délivrée (EDF, Engie, Direct Energie, Eni, Total Spring… utilisent tous son réseau de distribution). Une partie de ce qui échappe donc à EDF en matière de facturation est récupérée dans le groupe par l’intermédiaire d’Enedis sous forme d’abonnements et de frais inhérents au réseau prélevés sur les factures. On y ajoutera bien sûr les profits juteux des futures activités de cette filiale du groupe...
  • Rachat d’Areva NP par EDF à hauteur de 75% et intégration dans le groupe sous le nom de Framatome.
  • Enfin, détention d'EDF par l'Etat à hauteur de 85%.
Résumons : 

On comprend tout de suite avec un tel schéma quel vont être le circuit des dividendes, les contrôles par l'Etat... sans oublier le principe des vases communicants, loi de physique qui fonctionne également dans les domaines financiers.

Mais comment en est-on arrivé là ? 

Dix ans après l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité, EDF tombe de son piédestal. Le fournisseur a perdu 302 000 clients au troisième trimestre 2017 selon les chiffres de la Commission de régulation de l'énergie. On estime à 1,12 million le nombre de clients perdus durant l'année écoulée. La concurrence est rude et seuls 4000 clients ont été convaincus par les nouvelles offres d'EDF. De son côté, Total se flatte de gagner 2000 clients par jour avec son offre dénommée « Total Spring »…

L'action EDF a perdu les deux tiers de sa valeur en trois ans (rappelons que l’Etat détient 84,5% du groupe). Une nouvelle chute de l’action de 6,57% fut enregistrée lors de la nomination de Nicolas Hulot comme ministre de la Transition écologique et solidaire, en cause : la dépendance de l'entreprise au nucléaire.

Face à d'importants investissements, dont la maintenance de ses 58 réacteurs nucléaires ou le rachat d'une partie d'Areva, le groupe EDF est confronté à une dette de 37 milliards d'euros. Le géant de l'électricité dirigé par Jean-Bernard Levy supprime 4000 postes sur trois ans, alors qu'il a perdu sa place au CAC 40. Le projet ambitieux de deux réacteurs EPR à Hinkley Point au Royaume-Uni a provoqué une crise, le 7 mars, avec la démission du directeur financier, qui met en doute sa faisabilité... Et les nouveaux surcoûts pour le chantier de l'EPR de Flamanville s’ajoutent à ce tableau... 

EDF: les six erreurs de l'Etat actionnaire : 

C'est la chronique d'une catastrophe industrielle et financière annoncée. Le principal propriétaire de l'électricien a enchaîné les mauvaises décisions. Pour expliquer cette déconfiture, violente, brutale, on peut bien sûr évoquer le retournement des marchés de l'énergie, ou encore taper sur le libéralisme inconscient et destructeur de Bruxelles. Mais on peut aussi regarder du côté de l'Etat, qui, avec ses multiples casquettes - actionnaire majoritaire, régulateur ou encore architecte du compromis social -, porte une lourde responsabilité dans les difficultés de l'ancien champion tricolore de l'énergie.


1. Des dividendes trop élevés...

Même Jean-Bernard Lévy en a été surpris. Lorsqu'il est arrivé à la tête du groupe, il a découvert avec stupéfaction qu'EDF s'endettait pour payer des dividendes. Depuis son introduction en Bourse, en 2006, l'entreprise reverse entre 55 et 60% de son bénéfice à l'Etat. Soit près de 2 milliards d'euros par an, ce qui constitue la moitié des dividendes de l'Etat actionnaire. Tant que les résultats du groupe étaient dans le vert, personne ne trouvait à y redire.

2. Un développement totalement grippé...

Depuis 2014, EDF affiche un cash-flow négatif inférieur à la contribution d'EDF au budget de l'Etat. C'est aberrant, surtout lorsqu'on connaît les besoins en investissements du groupe.
Au titre de la CSPE, cette taxe créée en 2003 pour financer le développement des énergies renouvelables, l'Etat doit près de 5 milliards d'euros à EDF. En 2013, un accord a été conclu pour étaler dans le temps le remboursement de cette créance, mais l'Etat, fidèle à son image de mauvais payeur, ne s'est toujours pas acquitté de la première échéance.


3. Un chiffrage des travaux à l'aveugle...

"Sur les investissements à très long terme d'EDF, l'Etat semble faire ses estimations totalement au doigt mouillé", constate un expert du secteur. De fait, qu'il s'agisse du démantèlement des centrales, de l'enfouissement des déchets nucléaires ou du renouvellement du parc, il y a à peu près autant de chiffrages que d'experts. Et jamais personne pour trancher.

4. Un Etat trop faible face à ses dirigeants...

Alors que l'Etat était majoritaire dans les deux entreprises, acteurs de la filière du nucléaire (EDF et AREVA), il a laissé prospérer des batailles d'ego qui ont beaucoup nui aux deux.


5. Le rachat d'Areva, le pire remède...

Jean-Bernard Lévy a accepté, à la demande de l’Etat, de racheter Areva NP (la branche réacteurs du groupe), sans se demander si EDF en était financièrement capable.
"Industriellement, cela n'a pas de sens, nous n'avons aucune compétence dans la construction de réacteurs. D'un point de vue financier, c'est pire, on va demander à un malade de soigner un mourant, dénonce un syndicaliste. Concrètement, nous allons payer trois fois pour Areva : pour l'acheter, pour pallier son absence du tour de table d'Hinkley Point, et pour lui assurer des contrats."


6. L'absence de vision stratégique...

Tous les observateurs s'accordent à le dire : sur le fond, EDF manque d'une vision stratégique de long terme et d'un scénario précis et assumé de transition énergétique.
Les gouvernements précédents ont opté pour la politique du ni-ni : on ne construit pas de nouvelle centrale, mais on n'arrête pas le nucléaire pour autant. Un statu quo dangereux quand on connaît les besoins en investissements de la filière.
Et que dire du gouvernement actuel qui, dans le même temps, demande à EDF d'être le château d'eau du nucléaire à l'international, d'investir dans le renouvelable, de se conformer aux objectifs de 50% de nucléaire dans la production d'électricité à l'horizon 2025, et qui se refuse à fermer la moindre centrale ?